°g°erboiseries*

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Christopher Isherwood, Adieu à Berlin

Christopher Isherwood, Adieu à BerlinChristopher Isherwood raconte sa vie à Berlin au début des années 30. Le livre est divisé en parties centrées sur certains personnages, de milieux sociaux variés, que le narrateur est amené à fréquenter du fait de son statut précaire d’écrivain-répétiteur d’anglais. D’abord superficiel et léger (un peu trop peut-être, ces passages inconséquents m’ont un peu ennuyé), le récit se teinte de mélancolie à mesure que le nazisme s’empare insidieusement de la capitale. La menace s’incarne tour à tour dans des personnages d’abord insignifiants, simples sympathisants pathétiques. Je m’inquiétais initialement du ton trop badin, mais il renvoie sans doute à l’inconscience générale face à la montée du nazisme. Les toutes dernières pages, consacrées au départ définitif de Berlin en 1933, sont d’une émotion stupéfiante comparée à la timide gradation qui les a précédées.

À noter, pour nous autres lecteurs pédés, le joli jeu de piste que représente ce livre ; l’homosexualité d’Isherwood n’a été révélée que récemment, et il n’y est pas directement fait allusion dans ce livre. Pourtant le lecteur averti ne s’y trompera pas. Par exemple, chez les Landauer, riche famille juive qui l’a convié à un repas :

Et de nouveau me prenant à partie :
— Je viens justement de lire un ouvrage français sur votre grand poète, Lord Byron. C’est du plus haut intérêt. Mais je serais très heureux de connaître votre opinion d’écrivain sur la très importante question que voici : Lord Byron s’était-il rendu coupable du crime d’inceste ? Quel est votre avis, Mr. Isherwood ?

Je sentais que je commençais à rougir. Chose curieuse, ce qui me gênait surtout, ce n’était pas la présence de Natalia, mais celle de Frau Landauer, placidement occupée à mâcher. Bernhardt, avec un sourire subtil, baissait les yeux sur son assiette.

— Eh bien, commençai-je : c’est assez difficile…
— Le problème est du plus haut intérêt, interrompit Herr Landauer, nous regardant tous gentiment à la ronde et continuant à mastiquer d’un air satisfait : Allons-nous admettre que l’homme de génie est un individu d’exception, qui a droit à une conduite exceptionnelle ? Ou bien dirons-nous : « Non. Vous écrivez de beaux poèmes ou peignez de beaux tableaux, soit ; mais dans la vie courante, vous devez vous conduire comme une personne ordinaire et obéir aux lois que nous avons instituées pour les gens ordinaires ; nous ne vous permettrons pas d’être extra-ordinaire ? »

Herr Landauer, la bouche pleine, nous fixait triomphalement les uns après les autres. Tout à coup le rayonnement de son regard se concentra sur moi :
— Oscar Wilde, votre auteur dramatique, voilà un autre cas. Je vous soumets ce cas, Mr. Isherwood. J’aimerais connaître votre opinion. Votre justice d’Angleterre était-elle ou non en droit de châtier Oscar Wilde ? Dites-moi ce que vous en pensez, je vous prie.

Il me considérait, ravi, la fourchette avec le morceau de viande suspendue à mi-chemin de sa bouche. À l’arrière-plan, je percevais le sourire discret de Bernhardt. Les oreilles brûlantes, je recommençai :
— Eh bien…

Mais cette fois je fus inopinément tiré d’embarras par une observation que Frau Landauer adressait en allemand à Natalia, durant laquelle Herr Landauer parut oublier son problème.

Chikinki + Supersystem

Je ne connais vraiment ni l’un ni l’autre, j’y suis allé pour voir, parce que c’était peu cher et au Nouveau Casino, petite salle sympathique. Apparemment peu de gens ont raisonné comme moi : la salle est à peine clairsemée d’un public entre deux âges. Bon, c’est pas gagné.

Ce soir les synthés sont à l’honneur, ils jouent un rôle central dans les compos des deux groupes qui se succèdent. Chez Supersystem, ils s’intègrent dans une électro métissée. Ils font tantôt une sorte de sous-Rapture bordélique, avec leurs voix un peu pénibles et répétitives, mais tantôt leur musique se teinte d’Orient, la guitare part pour l’Afrique ou les Caraïbes, les rythmes se syncopent, tanguent et chaloupent, et là, on se dit que ce groupe à quelque chose à apporter, que c’est bien, que c’est beau. Je retrouve les accents orientaux qu’on peut attraper chez Kasabian lorsqu’on est patient. Les Supersystem me sont sympathiques, le petit mec aux claviers a une bonne bouille. Un final rythmé et hypnotique clôture leur prestation dans la bonne humeur, avant que le groupe ne vienne se mêler au public pour la suite du concert.

Changement de décor, on passe du petit concert à la cool au débarquement des rock stars : Chikinki déboule sur scène. Quatre synthés pour deux musiciens, un batteur, une guitare – pas de basse, la basse est assurée par les synthés – et, incontournable, le chanteur. Ils sont lookés, tiennent leur rôle. Le guitariste gratte, stoïque et efficace. Le jeune binoclard, noyé dans sa choucroute de boucles blondes, frappe son clavier, plié en deux, torse à l’horizontale. Le chanteur capte immédiatement l’attention. Imaginez une grande autruche avec un t-shirt trop petit et une ceinture cloutée, complètement pétée, qui minaude en bafouillant à la recherche des quelques mots de français qu’elle sait encore… Pourtant dès que le show commence, on s’en prend plein la tête ; c’est plus dansant que je n’aurais pensé. On nous expédie le tube Ether Radio en deuxième, pas mal, puis le reste de l’album mêlé à des trucs que je ne connais pas. Ils restent toujours crédibles, même s’il manque sans doute un petit quelque chose. Ferveur cependant lors du rappel, lorsqu’ils reprennent Rock & Roll du Velvet Underground.

Orange Quest IV

Il vient de faire la liste de ses dix films préférés pour l’année 2005. Numéro 1 : Mysterious Skin. Numéro 2 : Moi, toi et tous les autres. My goodness. C’est effroyable, j’aurais choisi les mêmes. Les mêmes ! Et j’ai une preuve pour le numéro 2 ! Quant au 1, j’ai des témoins !

À part ça, les plaisanteries les plus courtes étant les meilleures, les commentaires sarcastiques de TAG n’étant pas toujours très bien compris, et l’identité d’Orange devant être connue d’à peu près la moitié de la blogosphère, il convient peut-être de se calmer un peu dans le déballage. Si le seul intérêt est de faire péter nos high-scores de fréquentation de blog, ça devient un peu… vulgaire. Et je déteste la vulgarité, c’est bien connu.

En conséquence, la saison 1 d’Orange Quest touche à sa fin. Si saison 2 il doit y avoir, ce sera dans un cadre plus pudique (et qui sait, plus intime… hé hé hé ; mais c’est une autre histoire). Un grand merci à tous les joyeux loulous qui, par leurs ragots et leurs commérages, ont rendu tout cela possible. Je vous aime tous, mes chéris !